Intestin irritable et rôle des probiotiques
Le syndrome de l'intestin irritable est un trouble fonctionnel du système digestif qui touche entre 5 et 10% de la population mondiale, provoquant inconfort abdominal, ballonnements et troubles du transit. Face à ces symptômes parfois invalidants, les probiotiques sont souvent évoqués comme une solution naturelle. Mais quelle est vraiment l'efficacité des probiotiques sur le SII ? Et quelles souches privilégier pour un soulagement optimal ?
Syndrome de l'intestin irritable (SII) ou colopathie fonctionnelle
Le syndrome du côlon irritable, aussi appelé colopathie fonctionnelle, est un trouble intestinal fonctionnel chronique (TFI). Il se traduit par des troubles digestifs se manifestant principalement par des douleurs abdominales ainsi que des changements dans la fréquence ou la consistance des selles. Tout comme la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique, cette pathologie chronique évolue par « poussées », alternant des phases dans lesquelles les symptômes sont importants, suivies de périodes de rémission.
Dans le cas du syndrome de l’intestin irritable, aucune lésion de l’organe ni anomalie de la muqueuse digestive ne sont détectées. Il s’agit d’une maladie fonctionnelle qui ne peut être étayée par aucun marqueur biologique ni examen spécifique, ce qui rend son diagnostic complexe. Ce sont donc des facteurs externes qui sont mis en cause dans son dysfonctionnement. Bien que cette pathologie ne soit pas grave, elle altère significativement la qualité de vie des personnes qui en souffrent.
Les symptômes de la colopathie fonctionnelle
Les symptômes de la colopathie fonctionnelle surviennent généralement après l’ingestion d’un repas. Ils varient d’un patient à l’autre, mais se manifestent le plus souvent par :
- Douleurs abdominales : souvent sous forme de crampes, localisées principalement au bas-ventre et pouvant être soulagées après l’évacuation des selles. La douleur est fréquemment matinale ou postprandiale.
- Troubles du transit intestinal : alternance d’épisodes de diarrhée et de constipation, présence de selles molles ou dures, avec parfois une sensation d’évacuation incomplète.
- Ballonnements et gaz : sensation de ventre gonflé et inconfort digestif lié à une fermentation excessive dans l’intestin.
- Présence de mucus dans les selles : sécrétions blanchâtres ou translucides dans les selles, sans infection sous-jacente.
- Fatigue et troubles du sommeil : conséquences des troubles digestifs chroniques.
Ces symptômes sont moins connus et donc moins évoqués, pourtant d'autres manifestations peuvent accompagner, voire aggraver le syndrome de l’intestin irritable, comme l’anxiété, le stress, les maux de tête ou encore les douleurs musculaires.
Les causes de la maladie
La colopathie fonctionnelle résulte d’un ensemble de facteurs qui perturbent le fonctionnement normal du système digestif. Bien qu’aucune lésion organique ne soit détectable, plusieurs mécanismes sont mis en cause :
1. Intolérances alimentaires
Certaines personnes atteintes de colopathie fonctionnelle présentent des difficultés à digérer certains aliments, notamment :
- Le lactose (sucre du lait), qui peut provoquer ballonnements et diarrhées.
- La caséine (protéine du lait), impliquée dans des réactions inflammatoires chez certains individus.
- Le gluten, qui peut entraîner des troubles digestifs sans pour autant relever d’une maladie cœliaque.
2. Altération de la barrière intestinale
L’intestin grêle joue un rôle clé dans la protection de l’organisme contre les agents pathogènes et les toxines grâce à sa barrière. Un intestin perméable peut entraîner :
- Une inflammation chronique de bas grade.
- Une hypersensibilité aux aliments et aux bactéries intestinales.
3. Altération de la motilité intestinale
Le péristaltisme intestinal (contractions des muscles de l’intestin) permet la progression du bol alimentaire dans le tube digestif. Plusieurs études ont mis en évidence des anomalies de cette motricité chez les personnes ayant un intestin irritable. Ces contractions irrégulières peuvent entraîner un transit accéléré (diarrhée), un transit ralenti (constipation) ou une alternance entre les deux.
4. Altérations du processus de la douleur
Les personnes atteintes de colopathie fonctionnelle peuvent avoir une hypersensibilité au niveau digestif, ce qui signifie que leur intestin perçoit la douleur de manière amplifiée, même en l’absence d’une inflammation visible.
5. Dysbiose intestinale
Le microbiote intestinal, composé de milliards de bactéries bénéfiques, joue un rôle clé dans la digestion et l’immunité. Une altération de cet équilibre, appelée dysbiose intestinale, peut favoriser :
- Une fermentation excessive des aliments, générant des ballonnements et des gaz.
- Une mauvaise absorption des nutriments, entraînant des carences et de la fatigue.
- Une inflammation chronique de la muqueuse intestinale.
Dans certains cas, une prolifération excessive du Candida albicans, un champignon naturellement présent dans l’intestin, peut aggraver la situation en favorisant la perméabilité intestinale et les inconforts digestifs.
6. Stress et facteurs psychologiques
Le stress, l’anxiété et les émotions négatives peuvent exacerber les symptômes de la colopathie fonctionnelle. En effet, le stress peut :
- Avoir un impact sur les contractions des muscles intestinaux.
- Majorer les douleurs abdominales.
- Influencer la composition des bonnes bactéries du microbiote intestinal.
7. Dysfonctionnement de l’axe cérébro-intestinal
L’intestin et le cerveau sont étroitement liés par le système nerveux entérique et le nerf vague.
Chez les patients atteints de colopathie fonctionnelle, plusieurs anomalies ont été identifiées dans cette communication, notamment :
- Une hypersensibilité viscérale : le système digestif étant fortement innervé, les signaux intestinaux, normalement anodins, sont perçus comme douloureux en raison d’un seuil de stimulation plus bas dans les neurones entériques.
- Un excès d’informations envoyées au cerveau émotionnel : des études ont montrés que, chez les patients souffrant de colopathie fonctionnelle, un volume anormalement élevé de signaux digestifs est transmis au système limbique, la zone du cerveau impliquée dans la gestion des émotions et du stress. Cette hyperréactivité pourrait expliquer pourquoi les douleurs intestinales sont souvent exacerbées par des facteurs émotionnels comme l’anxiété.
- Des anomalies dans la régulation des réponses motrices et hormonales : un dérèglement du système nerveux entérique peut perturber le transit intestinal et la digestion, expliquant les variations du transit et les troubles digestifs.
Comment soigner un côlon irritable ? Nos recommandations
Le traitement du syndrome de l'intestin irritable (SII) repose principalement sur des ajustements alimentaires, la gestion du stress et l’utilisation de solutions naturelles pour atténuer les symptômes.
Adopter une alimentation saine et équilibrée
Une alimentation adaptée est essentielle pour apaiser l’intestin et limiter les désagréments digestifs. Voici quelques principes à suivre :
- Limiter les aliments irritants : café, alcool, épices, aliments ultra-transformés, sucres raffinés.
- Réduire les FODMAPs : ces sucres fermentescibles présents dans certains fruits, légumes, céréales et produits laitiers peuvent aggraver les ballonnements et les douleurs. Un régime pauvre en FODMAPs, encadré par un professionnel, peut être bénéfique.
- Manger à heures régulières, dans un endroit calme et bien mastiquer pour faciliter la digestion
- Éviter les repas copieux et le grignotage.
- Éviter les excès de fibres insolubles (présentes dans le son de blé, les légumineuses, les légumes crus) si elles aggravent les ballonnements.
Rééquilibrer sa flore intestinale
L’intestin est peuplé de milliards de micro-organismes qui influencent la digestion. Pour restaurer l'équilibre de la flore intestinale, il est essentiel de maintenir un apport équilibré en probiotiques et en prébiotiques.
Le traitement du SII par certaines souches spécifiques de probiotiques aide à réensemencer la flore digestive. Il est également primordial de les combiner avec des prébiotiques, ces fibres végétales qui nourrissent les bonnes bactéries de l’intestin. Les prébiotiques se trouvent dans les céréales complètes, les légumes, les fruits frais et les légumineuses.
Enfin, limiter les aliments inflammatoires comme les produits laitiers, le gluten ou les aliments trop gras afin de laisser le temps nécessaire à l'intestin de se réparer..
Réparer la barrière intestinale
Notre intestin est doté d'une barrière essentielle qui protège l'organisme des pathogènes extérieurs tout en permettant l'absorption des nutriments nécessaires à son bon fonctionnement. Lorsque cette barrière devient trop perméable, on parle de syndrome de l'intestin perméable (ou leaky gut). Cela peut conduire au passage de substances non digérées dans la circulation sanguine, provoquant une inflammation chronique et perturbant l'équilibre du système immunitaire.
Réguler l'inflammation
L’inflammation chronique de la muqueuse intestinale est un facteur aggravant des symptômes du côlon irritable. Pour la réduire :
- Limiter les aliments pro-inflammatoires comme les produits laitiers en excès, le gluten, les sucres rapides et les graisses saturées.
- Favoriser les aliments aux propriétés anti-inflammatoires : curcuma, gingembre, poissons gras riches en oméga-3.
Gérer son stress et ses émotions
Le stress étant un facteur déclencheur majeur du syndrome du côlon irritable, il est important d’agir sur son bien-être mental :
- Pratiquer des exercices de respiration et de cohérence cardiaque pour calmer le système nerveux.
- Essayer des techniques de relaxation comme la méditation, le yoga ou la sophrologie.
- Travailler sur ses émotions via l’écriture thérapeutique, la kinésiologie ou la thérapie si nécessaire.
- Maintenir une activité physique régulière pour stimuler le transit et libérer les tensions nerveuses.
Quel probiotique choisir en cas de syndrome du côlon irritable ?
Probiotiques, késako ?
Les probiotiques sont des micro-organismes vivants (bactéries et levures) qui, lorsqu’ils sont consommés en quantités adéquates, contribuent à l’équilibre du microbiote intestinal et à la santé digestive de l'hôte. Le probiotique renforce la barrière intestinale, réduit l’inflammation et module la réponse immunitaire.
En cas de syndrome de l'intestin irritable, le microbiote est souvent déséquilibré, ce qui peut aggraver les symptômes comme les ballonnements, les gaz, les douleurs abdominales, la diarrhée ou la constipation. La prise en charge du syndrome de l'intestin irritable par les probiotiques peuvent alors aider à restaurer cet équilibre.
Ballonnement, gaz, constipation, diarrhée, crampes... quels probiotiques sont efficaces pour atténuer les symptômes du côlon irritable ?
La prise en charge du syndrome de l'intestin irritable par les probiotiques peut participer à l'amélioration des symptômes et au retour à l'équilibre. Voici nos recommandations :
Lactobacilles
Les Lactobacillus, de la famille des lactobacillaceae, sont des bactéries bénéfiques pour la santé digestive. Certains types de lactobacilles sont particulièrement efficaces pour les symptômes du SII.
- Lactobacillus plantarum : réduit les douleurs abdominales et les ballonnements en réduisant les fermentations intestinales.
- Lactobacillus acidophilus : aide à réguler le transit et soulage les douleurs abdominales liées au SII.
- Lactobacillus reuteri : particulièrement efficace pour les formes de SII avec diarrhée prédominante (SII-D).
- Lactobacillus rhamnosus : cette souche améliore globalement les symptômes du SII et peut être utilisée en complément d'autres probiotiques.
Bifidobactéries
Les Bifidobacterium ont démontré des effets positifs sur le SII, particulièrement pour réduire l'inflammation et améliorer le confort intestinal.
- Bifidobacterium infantis : apaise l'inflammation, les douleurs et les ballonnements et régule la réponse inflammatoire liée à l'hyperperméabilité intestinale.
- Bifidobacterium lactis : aide à maintenir l'équilibre du microbiote intestinal et régule la fréquence des selles.
- Bifidobacterium longum : améliore les symptômes digestifs et peut également soulager les troubles associés à l'anxiété et à la dépression.
- Bifidobacterium breve : les résultats montrent que cette souche apaise les douleurs abdominales, l'inflammation intestinale et améliore la perméabilité intestinale.
Levures Saccharomyces
Les recherches ont montré que les levures, comme Saccharomyces boulardii, sont particulièrement utiles pour les formes mixtes et diarrhéiques du SII.
Les études indiquent que le traitement du SII avec les souches de Saccharomyces boulardii améliore les symptômes du SII-D et du SII-M, réduit l'inflammation et régule la fonction intestinale.
Est-il dangereux de prendre des probiotiques ?
Les probiotiques se trouvent principalement sous forme de compléments alimentaires et, bien qu'ils ne présentent généralement aucun danger, une prise inadaptée ou un mélange de souches mal ciblées peut ne pas apporter les bénéfices attendus. Dans certains cas, cela peut même aggraver certains déséquilibres intestinaux.
De nombreuses études ont montré l'efficacité des probiotiques. Cependant, il est important de noter que leur efficacité dans le traitement du syndrome de l'intestin irritable (SII) dépend de plusieurs facteurs, tels que la quantité de bonnes bactéries présentes dans le produit et le respect de la posologie recommandée par le laboratoire ou le fabricant.
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